Voici
trois ans qu'est morte ma grand-mère,
- La bonne femme, - et, quand on l'enterra,
Parents, amis, tout le monde pleura
D'une douleur bien vraie et bien amère
Moi seul j'errais dans la maison, surpris
Plus que chagrin ; et, comme j'étais proche
De son cercueil, - quelqu'un me fit reproche
De voir cela sans larmes et sans cris.
Douleur bruyante est bien vite passée
Depuis trois ans, d'autres émotions,
Des biens, des maux, - des révolutions, -
Ont dans les coeurs sa mémoire effacée
Moi seul j'y songe, et la pleure souvent ;
Depuis trois ans, par le temps prenant force,
Ainsi qu'un nom gravé dans une écorce,
Son souvenir se creuse plus avant !
Où
sont nos amoureuses ?
Elles sont au tombeau !
Elles sont plus heureuses
Dans un séjour plus beau !
Elles sont près des anges,
Dans le fond du ciel bleu,
Et chantent les louanges
De la mère de Dieu !
Ô blanche fiancée !
Ô jeune vierge en fleur !
Amante délaissée,
Que flétrit la douleur !
L'éternité profonde
Souriait dans vos yeux...
Flambeaux éteints du monde,
Rallumez-vous aux cieux
Au
printemps, l'oiseau naît et chante ;
N'avez-vous pas ouï sa voix ?...
Elle est pure, simple et touchante
La voix de l'oiseau - dans les bois !
L'été, l'oiseau cherche l'oiselle :
Il aime, et n'aime qu'une fois !
Qu'il est doux, paisible et fidèle
Le nid de l'oiseau - dans les bois !
Puis, quand vient l'automne brumeuse,
Il se tait,... avant les grands froids.
Hélas ! qu'elle doit être heureuse
La mort de l'oiseau - dans les bois
J'ai
fait mon épitaphe et prends la liberté
De vous la dédier dans un sonnet stupide
Qui s'élance à l'instant du fond d'un cerveau vide...
Mouvement de coucou par lefrois arrêté :
La misère a rendu ma pensée invalide !
EPITAPHE
Il a vécu, tantôt gai comme un sansonnet,
Tour à tour amoureux, insoucieux et tendre,
Tantôt sombre et rêveur comme un trsite Clitandre,
Un jour il entendit qu'à sa porte on sonnait.
C'était la Mort ! alors il la pria d'attendre
Qu'il eût posé le point à son dernier sonnet ;
Et puis sans s'émouvoir, il s'en alla s'étendre
Au fond du coffre froid où son corps frissonnait.
Il était paresseux, à ce que dit l'histoire,
Il laissait trop sécher l'encre dans l'écritoire,
Il vouilait tout savoir mais il n'a rien connu.
Et quand vint ler moment, où, las de cette vie,
Un soir d'hiver, enfin, l'âme lui fut ravie,
Il s'en alla, disant : « Pourquoi suis-je
venu ? »
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Maj 20/05/2004